« Prier la Parole… pour en vivre » propose une écoute priante de la Parole. Elle est fondée sur la conviction que la Parole de Dieu est vivante et « prend chair » aujourd’hui dans la vie de celui qui l’accueille en vérité. Passant par une compréhension du texte, la recherche de son sens profond, elle achemine naturellement vers un cœur à cœur avec Dieu qui ne peut qu’influer sur l’agir au quotidien. Cette prière de la Parole est l’héritière d’une longue tradition appelée Lectio divina.
Il y a une semaine, nous contemplions Jésus, le ‘bon berger’ qui donne sa vie pour ses brebis. En ce 5ème dimanche de Pâques, la liturgie nous propose une autre image, celle de la ‘vraie vigne’. Elle nous fait découvrir la relation privilégiée, et inouïe, qui unit Jésus et ses disciples afin de produire du fruit en abondance. Plus qu’une ‘image pieuse’, c’est une réalité bien concrète relatée, par exemple, dans l’extrait du livre des Actes des Apôtres lu ce jour. La communion au Seigneur et le fruit qui en découle sont omniprésents : il y est question de « s’exprimer avec assurance au nom de Jésus ; l’Église était en paix et, réconfortée par l’Esprit Saint, elle se multipliait » (Ac 9, 26-31). Dans sa première épître, saint Jean en parle encore autrement aux ‘bien-aimés’ : garder les commandements de Dieu, s’aimer les uns les autres, demeurer en Dieu et Lui en nous… (1 Jn 3, 18-24) Le chemin est ouvert…
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Prier l’évangile de Jean (15, 1-8)
1er temps – Invocation à l’Esprit Saint
- Invoquer l’Esprit Saint et prendre un bref moment de silence
Seigneur, tu nous as promis ton Esprit Saint.
Qu’aujourd’hui encore, il m’éclaire et me fasse goûter ta Parole.
Que celle-ci, à l’exemple de Marie, prenne corps en moi
et que, humblement, je puisse la « mettre au monde ».
Que ton Esprit habite mon cœur
et fasse de moi une demeure de prière et de louange.
Ou avec des mots personnels…
2ème temps – Lectio
- Lire le texte en silence.
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean (Jn 15,1-8)
En ce temps-là, Jésus disait à ses disciples :
01 « Moi, je suis la vraie vigne, et mon Père est le vigneron.
02 Tout sarment qui est en moi, mais qui ne porte pas de fruit, mon Père l’enlève ; tout sarment qui porte du fruit, il le purifie en le taillant, pour qu’il en porte davantage.
03 Mais vous, déjà vous voici purifiés grâce à la parole que je vous ai dite.
04 Demeurez en moi, comme moi en vous. De même que le sarment ne peut pas porter de fruit par lui-même s’il ne demeure pas sur la vigne, de même vous non plus, si vous ne demeurez pas en moi.
05 Moi, je suis la vigne, et vous, les sarments. Celui qui demeure en moi et en qui je demeure, celui-là porte beaucoup de fruit, car, en dehors de moi, vous ne pouvez rien faire.
06 Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est, comme le sarment, jeté dehors, et il se dessèche. Les sarments secs, on les ramasse, on les jette au feu, et ils brûlent.
07 Si vous demeurez en moi, et que mes paroles demeurent en vous, demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous.
08 Ce qui fait la gloire de mon Père, c’est que vous portiez beaucoup de fruit et que vous soyez pour moi des disciples. »
Pour répondre à des questions de compréhension, je peux m’aider des repères suivants.
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- « En ce temps-là », c’est le soir du dernier repas de Jésus avec ses disciples. Il leur a lavé les pieds ; Judas s’en est allé, décidé à le trahir. Alors, Jésus commence un long discours d’adieu, faisant pressentir aux disciples son départ imminent vers le Père. Il leur donne un « commandement nouveau : c’est de vous aimer les uns les autres. Comme je vous ai aimés, vous aussi aimez-vous les uns les autres » (13,34). Il leur promet aussi le don de l’Esprit.
« Levez-vous, partons d’ici », conclut-il (14,31). Mais Jésus va poursuivre son discours. Et c’est un véritable testament spirituel qu’il livre à ses apôtres, dans lequel chaque mot a une valeur inestimable. C’est un bagage pour ‘après’, quand Jésus ne sera plus là, comme auparavant. C’est aussi une ‘lumière’ pour nous aujourd’hui.
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- « Moi, je suis la vraie vigne ». Dans le chapitre 13, Jésus avait dit : « Je vous dis ces choses dès maintenant, avant qu’elles n’arrivent ; ainsi, lorsqu’elles arriveront, vous croirez que moi, JE SUIS » (13,19). « JE SUIS » sont les mots utilisés par Dieu quand il révèle son nom à Moïse au Buisson ardent (Ex 3,14).
- « Je suis la vraie vigne ». Pourquoi Jésus prend-il cette image ? Il aurait pu choisir l’olivier ou le figuier, plus beaux, plus vigoureux…
- Le travail du vigneron et tous les soins apportés à la vigne sont familiers aux contemporains de Jésus. La comparaison est donc éloquente.
- Elle renvoie aussi à de nombreux textes de l’ancien Testament, notamment le « chant de la vigne » dans le livre d’Isaïe : « Mon ami avait une vigne sur un coteau fertile. Il en retourna la terre, en retira les pierres, pour y mettre un plant de qualité. Au milieu, il bâtit une tour de garde et creusa aussi un pressoir. Il en attendait de beaux raisins, mais elle en donna de mauvais. (…) Pouvais-je faire pour ma vigne plus que je n’ai fait ? J’attendais de beaux raisins, pourquoi en a-t-elle donné de mauvais ? (…) La vigne du Seigneur de l’univers, c’est la maison d’Israël. (…). Il en attendait le droit, et voici le crime ; il en attendait la justice, et voici les cris » (Is 5,1-7). Ce texte rend compte de la relation forte, toute teintée d’un amour attentionné, entre Dieu et son peuple. Il est une belle image de l’Alliance qui les unit.
- Le bon fruit de la vigne est le raisin qui donne le vin, celui « qui réjouit le cœur de l’homme » (Ps 103,15). Mais en ce soir de la dernière Cène, comment ne pas y voir aussi un lien avec « la coupe de la nouvelle Alliance » (Lc 22,20) et l’Eucharistie, lieu par excellence de communion avec le Seigneur.
- Quand Jésus parle de lui, il dit « je suis la vraie vigne », comme il est le « vrai berger » (10,11). Il est la vigne véritable, totalement ajusté au cœur de Dieu et seul capable de donner le bon fruit attendu. Ce qu’Israël n’a pu réaliser (Is 5,7).
- Jésus conforte ses disciples : « Mais vous, déjà vous voici purifiés » (v.3). Il leur avait déjà dit au moment du lavement des pieds : « Vous-mêmes, vous êtes purs » (13,10). Il ne s’agit pas d’une purification rituelle mais du travail accompli par la Parole de Jésus que les disciples ont accueillie.
- Jésus exhorte ses disciples à « demeurer en lui ». Ce verbe a une double connotation : spatiale et temporelle. Il s’agit de se fixer en un lieu, plus exactement en Jésus – où se trouve la vraie vie – et d’y rester avec constance.
- « En dehors de moi, vous ne pouvez rien faire. » (v.5). Il est question de ‘faire’, il convient donc d’agir.
Cette parole, n’est pas celle d’un gourou qui exercerait une quelconque emprise mais plutôt l’humble aveu du Seigneur : c’est par moi que vous parvient la véritable vie, comme il en va du cep et des sarments. C’est sans doute aussi le constat venu de l’expérience spirituelle de l’évangéliste Jean et des premiers chrétiens.
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- « Les sarments secs on les jette au feu et ils brûlent » (v.6). On ne doit pas voir ici les ‘flammes de l’enfer’ mais tout simplement l’expression d’une destruction qui est la conséquence d’une déconnexion avec la source de vie.
- « Demandez tout ce que vous voulez, et cela se réalisera pour vous » (v.7). Jésus ne nous invite pas à lui demander tout et n’importe quoi. Mais il sait que, si nous demeurons en lui, notre prière sera une ‘prière en son nom’, ajustée à la volonté de Dieu. C’est d’ailleurs ainsi qu’il nous a appris à prier en nous confiant le ‘Notre Père’. Et « Quand vous me demanderez quelque chose en mon nom, moi, je le ferai » (14,14), avait-il promis précédemment. Ainsi, dans le livre des Actes des Apôtres, nous voyons, par exemple, Pierre guérir un infirme ‘au nom de Jésus’ (Ac 3,6).
- La « gloire » de Dieu (v.8) est à comprendre ici non comme une fierté mais plutôt comme la joie de Dieu de voir sa vie et son amour s’épancher abondamment.
Les éléments de la comparaison sont clairement explicités : le vigneron, c’est le Père ; la vigne, c’est Jésus. Les sarments « c’est vous » (= nous). Rien n’est dit au sujet de la sève qui irrigue le cep et les sarments. Ne peut-on y voir l’Esprit Saint promis par Jésus : « Moi, je prierai le Père, et il vous donnera un autre Défenseur » (14,16) ? Quant ‘au fruit’, à en croire les versets qui suivent l’évangile de ce dimanche, n’est-ce pas l’amour (« Demeurez dans mon amour » (v.9), « Aimez-vous les uns les autres » (v.12)) ?
Relire à nouveau le texte en silence : je repère des mots, tout spécialement ceux qui se répètent… Je repère de qui on parle, ce qui en est dit… Je peux me placer dans la scène, auprès des disciples… Je relève ce qui me parait important dans le texte.
Cette étape revêt un caractère plus studieux mais est importante pour « scruter » le texte biblique et lui permettre de véritablement me parler. « Que me dit le texte ? »
3ème temps – Meditatio
Relire lentement le texte : je regarde Jésus. Il me parle à travers cette Parole. Qu’est-ce que cet Évangile me révèle de lui ? Quelle est la foi qui s’y exprime ? Comment ce témoignage de foi résonne-t-il en moi ? Qu’est-ce qui me rejoint aujourd’hui ? En quoi suis-je éclairé(e) ? Touché(e) ? Interpelé(e) ?
Convaincu(e) que cette Parole de Dieu s’adresse à moi pour aujourd’hui, je ne me précipite pas pour rechercher des applications concrètes immédiates. Je ne me fixe pas sur moi-même mais sur Dieu en ayant une lecture christocentrique et en m’attachant d’abord à contempler la grandeur et la beauté du Mystère révélé.
4ème temps – Oratio/Contemplatio
Relire le texte lentement et laisser monter ma réponse, une prière nourrie des paroles du texte biblique et véritable cœur à cœur : je laisse mon cœur parler librement à Dieu, dans la louange, la demande de pardon, la supplication, l’intercession…
Il ne faut pas avoir peur de consacrer du temps à cette étape. Donner le temps au temps… pour permettre une adhésion du cœur. Le laisser s’ajuster à la disposition intérieure du Christ.
5ème temps – Actio
Il y a bien un 5ème temps, car en prolongement à ce temps de prière et par « la grâce de Dieu », la Parole prendra chair dans le concret de ma vie.
Lecture infiniment personnelle, la Lectio divina est aussi une lecture en Église.
Il est bon de terminer en priant le Notre Père qui nous replace au cœur de l’Église.
Vous pouvez clôturer votre prière en écoutant ce chant
Service de la Vie spirituelle
Vicariat du Brabant wallon
Illustration d’entête : © Pixabay – 3215625 – jplenio
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