Introduction à l’Évangile de Marc
Pendant l’année liturgique B qui commence au premier dimanche de l’avent, nous lirons l’Évangile de Saint Marc par petits morceaux dimanche après dimanche. Mais pour bien comprendre le déploiement du récit de Marc dans la liturgie, il serait intéressant de le lire en entier comme un ensemble (ce qui devrait nous prendre un peu moins de 2 heures !). Selon les renseignements tirés de la Tradition, ce livre qui serait né aux environs de l’an 69 serait l’œuvre d’un certain Marc interprète de Pierre. Ses destinataires seraient probablement pour les lecteurs chrétiens d’origine païenne.
Selon Jean Delorme, le livre peut être structuré soit selon l’espace géographique, soit selon le drame qui se joue, ou selon les rapports entre les personnages. Je choisis de le présenter en suivant le drame qui s’y développe. Car c’est à travers ce drame que se déploie le projet théologique de Marc.
Le prologue (1,1-13)
Marc affirme dès la première ligne de son livre que Jésus est le Christ (Messie attendu par Israël), le Fils de Dieu (1,1). Mais on ne sait pas encore tout à fait ce que cette annonce qui s’enracine dans la parole prophétique (1,2-3) veut vraiment dire. Dans la deuxième phrase du livre, Jean Baptiste apparaît et annonce celui dont on vient de dire qu’il est le Christ. Lorsque Jésus entre en scène à son baptême, une voix se fait entendre du ciel « Tu es mon fils bien-aimé, il m’a plus de te choisir » (1,11). Bien que son identité ait été ainsi rapidement révélée, Jésus lui-même en fait un secret. Ce secret messianique constitue « le ressort dramatique du livre » (Cahiers Évangile ½, p.23). Le récit de Marc tente donc de répondre à la question : qui est Jésus ?
Qui est Jésus ? (1,14-8,26)
Jésus proclame son message sur le règne de Dieu tout proche. Il en donne les signes par ses paroles et par ses actes, sans parler de lui. Les démons attestent qu’il est bien le Fils de Dieu ; mais Jésus les fait taire. Et les hommes, quant à eux, s’interrogent…
Jésus se révèle (8,27-16,8)
8,27-9,1 : À partir de 8,27, une première réponse d’homme à la question de l’identité du Maître tombe. C’est Pierre qui au nom des disciples dit : « Tu es le Christ ». Jésus ne refuse pas cette profession de foi de Pierre, tout à fait en cohérence avec l’affirmation du début du livre. Et pourtant, il impose le secret. Cette consigne est aussitôt assortie d’une première annonce de la Passion-Résurrection introduite par la formule : « Il commença à leur enseigner que… » (8,31). On peut donc en déduire que « le titre “Christ” est interdit pour l’instant, tant que Jésus n’a pas accompli son destin de Fils de l’Homme qui doit passer par la Passion-Résurrection. » (Cahiers Évangile ½, p.20).
9,2-13 : c’est le récit de la transfiguration où une voix se fait entendre : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé ». Cette déclaration reprend celle du baptême et c’est la voix de Dieu. Au baptême, la voix (« Tu es mon Fils bien-aimé ») s’adressait à Jésus seul dans une révélation secrète. A la transfiguration, la parole divine s’adresse aux trois disciples – Pierre, Jacques et Jean – et reste encore marquée par le sceau du secret. Celui-ci ne sera levé qu’à la réalisation du programme Passion-Résurrection.
10-13 : Débat autour du titre « Fils de David ». A partir du chapitre 10, il y a un nouveau tournant. À Jéricho (10,46-50), un aveugle s’écrie : « Fils de David, aie pitié de moi ! », lors de la montée de Jésus à Jérusalem. On a encore une réponse humaine sur l’identité de Jésus :
« Fils de David », ce qui est pratiquement l’équivalent de « Messie ». La discussion sur ce titre de Fils de David s’étend sur tout le séjour de Jésus à Jérusalem…
14,55-64 : La réponse de Jésus. Il y a la question officielle du grand prêtre devant le Sanhédrin « C’est toi le Christ, le Fils du Dieu béni ? » Cette question est fondamentale puisqu’elle reprend les deux titres de la première phrase de l’Évangile (Bonne Nouvelle de Jésus, Christ, Fils de Dieu). Pour la première fois, Jésus répond clairement au grand prêtre : « Je le suis » ; il se hâte aussitôt d’ajouter une note qui rappelle les annonces de la Passion-Résurrection : « vous verrez le Fils de l’Homme siéger à la droite de la Puissance et venir sur les nuées du ciel » (14,62). Il vient sur les nuées du ciel comme le Fils de l’Homme de Daniel pour exercer le jugement universel. Ceci est un blasphème pour le grand prêtre, parce que Jésus s’attribue les prérogatives divines. Mais si Jésus choisit de se prononcer maintenant, c’est précisément parce que c’est le moment où son destin s’accomplit.
Et quand il a expiré sur la croix, nous avons enfin une réponse d’homme, celle d’un païen – et ce n’est pas un hasard – un centurion romain au pied de la croix : « Celui-ci était vraiment Fils de Dieu » (15,39). Et voilà que la boucle est bouclée. A partir de ce moment-là, selon Marc, on peut dire que Jésus est Fils de Dieu parce qu’on l’a vu mourir. S’il est le Christ, il ne l’est pas comme on l’attendait. C’est le Crucifié qui est Fils de Dieu. C’est cela la pointe de l’Évangile de Marc qui correspond bien à sa christologie. Celle-ci consiste à montrer que Jésus est vraiment le Messie, il est vraiment de Fils de Dieu, mais c’est à travers sa Passion qu’il révèle ce qu’est vraiment le visage du Messie.
16,8 : le désarroi des femmes devant la révélation de la Résurrection
Apparitions de Jésus ressuscité et envoi en mission (16,9-20)
Photo : cco Pixabay-falco/5412
Patrick KIPASA
Vicariat Brabant wallon – service Vie spirituelle – viespirituelle@bwcatho.be