« Le Seigneur Jésus après leur avoir parlé,
fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu »
(Mc 16,19)
Aussi bref est l’évangéliste Marc pour nous parler de l’Ascension, un seul verset « le Seigneur Jésus après leur avoir parlé, fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu » (Mc 16,19), aussi sobre est cette sculpture qui va droit à l’essentiel. Marc ne parle ni d’ange, ni de montagne et cette sculpture n’en représente pas non plus. Elle me semble donc tout indiquée pour illustrer le texte de l’évangile que nous lirons ce jeudi 13 mai 2021, fête de l’Ascension en l’année B du temps de l’Église.

Photo © Jean-Yves Cordier (www.lavieb-aile.com) avec son aimable autorisation
Pour le grand retable du maître-autel (16e s.) de la chapelle de la Houssaye à Pontivy, les artistes ont réussi à sculpter la pierre blanche calcaire et à la recouvrir d’une polychromie de telle sorte que nous avons un chef d’œuvre exceptionnel. L’auteur de ce retable a bien compris l’unité du mouvement pascal en nous donnant à contempler la Passion, la Résurrection et l’Ascension comme un tout. Les scènes ont toutes un mouvement vertical et sont animées par un même langage de couleurs. Ce jour, c’est la partie consacrée à l’Ascension que nous contemplerons.
En haut de l’œuvre, le Christ ressuscité termine de disparaître dans les nuées, représentées ici par une sorte d’arrondi aux motifs symétriques et réguliers. Il ne reste de lui que le bas de sa tunique et ses deux pieds nus. Le mouvement a donc déjà été amorcé. L’élévation du Christ a commencé sur la croix, nous dirait l’évangéliste Jean.
En dessous du Ressuscité, un groupe de treize personnes comme divisé en deux. La division permet une symétrie. En avant plan, quatre personnages agenouillés se font face ; les autres sont debout : les deux grandes postures de prière sont représentées.
Des regards sont attirés par l’élévation de leur maître. Presque tous les visages sont tournés vers le haut. « Si donc vous êtes ressuscités avec le Christ, recherchez les réalités d’en haut : c’est là qu’est le Christ, assis à la droite de Dieu» (Col. 3,1) nous dirait l’apôtre Paul… et vous trouverez ces réalités en vous aimant les uns les autres comme le Christ vous a aimé , préciserait l’évangéliste Jean.
En dessous du Ressuscité, beaucoup de mains sont jointes. Ne témoignent-elles pas du désir de recevoir l’Esprit pour comprendre ce grand mystère de l’Ascension ? Ne renforcent-elles pas les postures de prière en soulignant la foi en l’intercession auprès de Jésus ressuscité qui a affirmé : « tout ce que vous demanderez en mon nom, je le ferai, afin que le Père soit glorifié dans le Fils » (Jn 14,13) ?
Plusieurs personnes du groupe sont facilement identifiables. À l’avant plan à genoux, la seule femme de l’assemblée , nous porte à reconnaître la mère de Jésus, la plus fidèle des disciples. Toujours à l’avant plan sur la gauche, un homme porte un livre, il peut donc être un des quatre évangélistes. Dans ce cas, c’est Matthieu, le seul qui ait été disciple du Christ.
Une femme, Marie la mère de Jésus, est subtilement représentée alors qu’elle n’est pas mentionnée dans les Écritures lors de la montée au ciel du Ressuscité. Elle est là remplie d’espérance, humblement agenouillée et les mains jointes, se fondant dans le groupe des disciples. Mais son regard la distingue des autres. Il n’est pas dirigé vers le Ressuscité qui s’élève. Elle regarde déjà plus loin, plus en avant là où, « entré dans la gloire, Jésus nous trace le chemin et nous conduit vers le matin de sa victoire : mystère découvert aux yeux de l’espérance[1] ».
Le groupe est composé de treize personnes alors que nous nous attendons spontanément à en trouver onze ou douze. Les regards et les mains ont été observés. Des regards et des positions de mains ont été repérés comme identiques. Il reste alors une question, un élément à éclaircir. En effet, une personne de ce groupe ne rentre pas dans les « normes ». Mais quel est cet homme qui se démarque ainsi ?
Un homme a le visage tourné vers nous. Il regarde dans notre direction mais de biais comme pour ne pas nous contraindre à quoi que ce soit. Il est le seul à être vêtu d’une tunique rouge foncé. De sa main droite, il nous bénit. Maintenant que nous l’avons bien repéré, notre regard ne peut plus le quitter… Ne serait-il pas le Christ Ressuscité lui-même, lui que les apôtres ne voient pas encore, ne reconnaissent pas et qui pourtant est bien là au milieu d’eux…mais autrement ?
Dans cette partie du retable, l’artiste a le génie de nous partager son regard de foi sur l’Ascension du Ressuscité : il représente à la fois l’absent qui disparaît au ciel et le présent qui se tient au milieu de ses disciples mais sous un nouveau mode de présence et identifiable grâce à la bénédiction qu’il nous donne. « Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient » nous écrit l’évangéliste Marc (Mc 16, 20).
Cette présence de ’l’absent – présent’ est très bien décrite par un autre artiste dans l’hymne[2] ci-dessous. Belle fête de l’Ascension !
Christ est parti
Sans nous quitter :
Le Fils de Dieu est glorifié.
Son absence partout
Nous accompagne.
Il est parti
Dans la nuée :
Qu’attendez-vous les yeux levés ?
Il est proche de nous
Quand il s’éloigne.
Il est parti
Pour instaurer
En nous l’étroite intimité.
Fixer le rendez-vous
Au ciel de l’âme.
Il est parti
Pour demeurer
Dans le grand corps d’humanité.
Son royaume est pour nous
En héritage.
Il est parti,
Il est monté.
L’Esprit descend nous habiter.
Et le silence en nous
Dit son passage.
Service de la Liturgie
Vicariat du Brabant wallon
[1] CFC (f. Pierre-Yves) ©CNPL.
[2] cfc-liturgie – Christ est parti sans nous quitter, CFC (f. Gilles), 2001.
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